"Affaire de La Sarraz"... Le conseil de la presse répond à la plainte de la SPV


« Viré de l'école parce qu'il est Noir »; Le quotidien Le Matin n'a pas fait son travail


On se souvient qu'au mois de mars de cette année, à la suite du renvoi d'un élève d'origine angolaise de l'établissement de La Sarraz, le journal Le Matin avait publié une série d'articles qui développaient la thèse d'une cabale raciste. L'Association du personnel enseignant de La Sarraz, appuyée par le comité cantonal de la SPV, avait alors manifesté, dans les locaux d'Edipresse, à Lausanne, son ras-le-bol d'une presse sensationnaliste qui surfe sur l'affectivité immédiate sans mise en perspective argumentée.

Les manifestants avaient alors remis une résolution qui évoquait, notamment, une saisie du conseil suisse de la presse1.
Le 5 mai, l'APELS et la SPV saisissaient en effet le Conseil de la presse en invoquant un certain nombre d'articles de la Déclaration des devoirs et des droits du/de la journaliste. Nous y faisions référence, en particulier au:

- chiffre 1 et 3, ainsi que le préambule de la «Déclaration»: obligation de rechercher la vérité; donner précisément comme telles des nouvelles non confirmées; principe d'équité;

- chiffre 5: rectification de toute information qui se révèle matériellement inexacte;

- chiffre 7: respecter la vie privée; s'interdire des accusations gratuites;

- chiffre 8: mise en avant de l'appartenance ethnique et respect de la dignité humaine.

L'APELS et la SPV avaient raison


Dans une prise de position du 10 novembre, le Conseil suisse de la presse a rendu son verdict, dont les conclusions sont les suivantes:


1. Le Matin n'a pas observé les dispositions des chiffres 1 et 3 de la « Déclaration des devoirs et des droits » en négligeant de prendre en compte des éléments d'information contradictoires et en ne prenant pas la précaution d'interroger des acteurs qui auraient pu l'amener d'emblée à nuancer, voire à récuser la thèse d'une démarche raciste.

2. Le silence sur des faits ou des opinions contraires à la thèse défendue, alors qu'ils étaient accessibles au moment de la publication, a pour effet de favoriser les accusations gratuites, ce qui est contraire au chiffre 7 de la « Déclaration des devoirs et des droits ».

3. La publication ultérieure d'avis contradictoires, dans la partie rédactionnelle ou sous forme de lettres de lecteurs, ne tient pas lieu de rectification au sens de du chiffre 5 de la « Déclaration des devoirs et des droits ». Le devoir de rectification incombe à la rédaction. (…)


Comme on le voit, l'avis du conseil de la presse est très sévère. Nous étions donc parfaitement légitimés à nous plaindre. Qu'en ont su les lecteurs du journal Le Matin? Pas grand chose sans doute, mais on peut constater que, depuis cette affaire, ce quotidien a su mettre la pédale douce sur le dossier scolaire; à tout le moins se montre-t-il plus prudent. Nous nous en félicitons.

Le comité cantonal reste vigilant. Il ne s'abstiendra pas d'intervenir à nouveau s'il estime que notre profession et notre engagement sont placés sous les feux des médias dans une approche sans distance critique.


Si le devoir de rectification incombe aux rédactions, il n'en demeure pas moins que nous devons nous aussi être attentifs à replacer l'école dans un cadre social et pédagogique à long terme, et ne pas nous laisser emporter par des coups de sang immédiats ou des emportements aux conséquences incertaines. C'est sûrement moins gratifiant, mais combien plus efficace.